L'établi

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Le dossier

Jérome

"Lorsque ce matin je me suis levé, une pensée traversa ma tête. La vie était-elle plein de vide ou pleine de plein. L'oeuf, la poule, l'univers, tout cela posé ne provoque pas grand chose face au cosmos grandissant." Face à lui, la vaste plein parisienne, un café fumant, du sucre partout sur la toile cirée jaunâtre. Le soleil, froid, une fois de plus, blanchissait le ciel. La tour Eiffel, indigne, s'élevait, grandissant les arbres boulognais. Déjà, les trains s'arrêtaient et au fond de l'évier les cendres s'entassaient. "Encore une belle journée".

Terminé le café, éteinte la lumière, fermée la porte, la rue l'accueille. Le long de la pente, les arbres jaunes et noirs laissent choir un peu trop vite leurs couverture d'été. Toujours un peu en avance, aller-retour, le train. Du sous-sol, les néons font office de lune d'équinoxe : ils attirent. Les panneaux nouveaux, les horaires télévisuels, les escalators en panne. Rien ne change, un peu moins de monde seulement. Pourtant, les lignes se raréfient depuis quelques semaines déjà. Les torrents de boue prenant leur part annuelle d'espace. Quelques fous s'ammusent parfois à surfer sur ces vagues folles et grumeleuses, pleines de boules d'acides. Ils sortent tous porte d'Orléans créant un peu trop souvent.l'attroupement, exercant ainsi les troupes de répressions nouvellement créées. Dehors, une fois sorti, il longe un boulevard sans nom, peut-être celui de l'habitude. Mais, malgré tout, "aujourd'hui est une bonne journée."

Du cinquième, on peut distinguer la noirceur du ciel, stations d'épuration, usines à pétrole, recyclage ferreux. Sous le toit de cuivre, toujours rouge, on a déjà affiché les retards de la semaine. Lui étonné, rencontre sur la feuille rose son nom. "Une erreur, la première !". Il se dirige donc vers le bureau des retardataires pour aller chercher son billet de retard. Poin de fonctionnaires, bureau vide. Il décide de regagner le sien. Plus de bureau : seulement un colloque de cravates de la semaine, angora du dimanche. Ils discuttent, en cercle, se frottant les jambes. Observant toujours leurs fabuleuses chaussures qui rebondissent au contact du sol.

"-hum, hum, fait-il

- Ah, Monsieur Sligo, nous vous attendions.

- ...

- Oui, nous vous attendions pour faire part de notre reflexion.

- Sur ?

- Votre travail, ..., ici.

- Oui, un problème ?

- Non, non seulement quelques précisions. "

Déjà cela sentait le complot à pleines narines, les problèmes à tout va, les précisions en forme d'éléphants et le billet de retard gros comme Lyon sur l'autoroute du soleil.

"- Oui, quelques précisions quant au dossier 4218.

- 4218...

- Oui, 4218, société Rigaud, outillage et main d'oeuvre, corporation Clef.

- Oui, un problème

- Non, quelques précisions, insistait-il."

"Bon, il y va, il attend, ils attendent ... !", pensait-il.

- La page 36 du dossier est manquante.

- Ah, bon, je vais la retrouver, l'imprimer et l'ajouter.

- Elle manquante car nous l'avons enlevée.

- Pourquoi ? Si je puis me permettre.

- Pour des précisions.

- Ah, bon lesquelles ?

- Je lis ! "

Ils se mettent alors tous autour de Karl et entamment, enfin, le coneiller général seul lit.

" Comme il est précisé dans la convetion 330-b, seuls sont autorisés à l'usage des produits toxiques (liste FG43-b-c1) les personnels de formations étiquetté 36-b." Un silence.

" - Oui, et alors ? , demande Karl

- 36-b ? Qu'est ce que ce code ?, demande le conseiller sous le ton du pauvre instituteur apprenant 7 fois 8 à toute la classe ?

- Qu'en sais-je, il faut regarder la liste. Vous savez, moi, ces codes !

- Et bien allons voir ce qu'est ce code, allons voir."

Ils se dirigent alors dans la bibliothèque, la grande, celles des références. Tout y est, rien n'y est plus : que des nombres, des lettres à significations non significatives. De longues rangées d'étalages, des coffre-forts barricadés, de lourds livres plein de chiffres. "Tout arrive ici !", songe Karl. "Tout s'y termine !" songe, au même instant le secrétaire général. LA présidence et la prestance du comité de censure se résumait à cela : la controversité des pensées. Quelques fois, Karl y pensait et il trouvait toujours que cela provoquait une crise de pessimisme, il l'oubliait alors tout de suite.

Droite, gauche, tout droit, au loin à gauche encore, quatrième à droite, étagère 46, quatrième niveau : le livre intitulé 36-b, un énorme livre. Karl le prend, l'ouvre : l'ensemble des pages se craquèle, puis tout tombe laissant un gros tas de poussière à ses pieds et la couverture du livre dans les mains de Karl. "Effarant !"

"- Bien, Monsieur Sligo, toutes les preuves sont détruites ? Non ?, questionne calmement le secréatire.

- Et bien, je le pense. A moins que le service de Lyon n'en ait des doubles. Cela dit, ose Karl, cela prouve, une fois de plus qu'il faudrait peut-être passé ç l'informatique.

- Monsieur Sligo, ne vous-a-t-on pas expliquer la politique de la maison en cette matière ?, s'énerve le secrétaire.

- Si, si."

La firme Rutherbok, dirigée depuis 80 ans par la prestigieuse famille polonaise Ruthervsky avait toujours réussi son travail en maudissant les machines. Elle arguait que ses employés coutaient moins cher qu'un gros investissement "plus amortissement, plus amortissement !". La bonne vieille écriture permettrait, quand toutes les machines ne marcheraient plus, d'avoir un marché gigantesque. Les syndicats ne se plaignaient pas : il n'y a vait aucun licenciement, mais plus aucune embauche depuis cinq ans. Les vieux partaient mais n'étaient pas remplacés. Forcément, le travail ne pouvait être totalement fait et le service de réécriture était surchargé. Pourtant, il avait eu une grande innovation par l'aménagement de la grande bibliothèque. Un nouveau stock de produits toxico-nettoyants avait enfin pu être utilisé. Malheureusement, sur ce livre de référence, il n'avait pas fait grand effet et Karl était somme toute plus que désabusé.

"- Bien, Monsieur Sligo, appuya le secrétaire distinguant toutes les sylabes, que faisons-nous ?

- ..."

Déjà, les autres sentant la confrontation se rapprochent de Karl refermant le cercle de puissance.

"- Contactons Lyon ! Hum, je contacte Lyon et je vous dis de quoi il en retourne !"

Légèrement lassé, regardant ses chaussures, le secrétaire acquiesse, retourne ses talons et trainant derrière lui la troupe de directeurs, sort du bureau. Karl, reste planté là un moment, le sentiment d'acoir vécu un premier instant de complication. Il se dirige lui aussi vers la sortie, puis la machine à café, mais en route il s'apperçoit que la machine est de l'autre coté du batiment. Il fait alors demi-tour, jugeant que si un des commis, sous-chefs, chefs, directeurs l'apperçoit dans une autre direction que celle de son téléphone-fax pour Lyon, ils iront d'un seul pas faire leur rapport en 16 exemplaires.

Il s'approche de son téléphone